Les autres types de récepteurs
Il convient de réserver, d'abord, une place spéciale aux appareils
destinés à mesurer la durée de présence
du soleil, pendant les différentes périodes de l'année.
Il s'agit des héliographes, sortes de chambres noires dans lesquelles
l'image du soleil s'inscrit, directement, sur un papier photographique lent
(type JORDAN OU PERS), ou bien, brûle ou décolore un papier spécial
(type CAMPBELL). Certains auteurs ont proposé des formules simples permettant
de déduire, de la durée de présence du soleil dans une
station déterminée, la valeur de l'intensité du rayonnement
global reçu dans cette station (ANGSTRÖM - BRAZIER).
Leur emploi ne semble pas fréquent en photologie forestière.
Mais, dans beaucoup de procédés non encore décrits, c'est l'il humain qui sert d'instrument, non pas pour lire les indications de tel ou tel appareil, mais pour apprécier, surtout l'égalité, de 2 teintes ou de 2 plages lumineuses. Car l'il, s'il est un excellent instrument d'optique, est, par contre, un photomètre détestable, quand il s'agit de mesurer l'intensité d'un éclairement, s'il ne possède aucune possibilité de comparaison. Ceci, en raison de sa constitution même, des diverses sensibilités des zones de sa rétine, et des variations rapides et inconscientes du diamètre de sa pupille (de 4,5 mm, sous 1 lux, à 2,4 mm sous 400 lux, selon LOWENSTEIN & WESTPHAL). Sa tolérance est extrêmement grande puisqu'il perçoit, sans pouvoir malheureusement les chiffrer, des éclairements qui s'étendent de 1/3000 de lux, par ciel nocturne sans lune, à 100 000 lux, et même plus, en plein soleil, en été, vers midi.
Cependant, l'il est utilisé comme
instrument dans certains des procédés indirects qui vont être
décrits :
Le papier photographique et les
méthodes photochimiques - Dans ces procédés,
l'il apprécie le degré de noircissement obtenu
sur un papier photographique lent, exposé, pendant un temps
déterminé, à la lumière naturelle, sous
bois et en plein découvert - ou bien le temps, variable avec
l'éclairement des diverses stations, mis par ce papier photographique
pour revêtir une teinte standard. Il semble que ce soit HARTIG
(1877), un Allemand, qui, le premier, ait eu l'idée d'utiliser
ce procédé en photologie forestière. Mais C'est
surtout l'Autrichien WIESNER qui, dès 1890, effectua en forêt
de très nombreuses mesures, et dont il publia les résultats
les plus importants en 1907. Cet auteur avait même tenté de
déterminer le changement de composition spectrale de la lumière
des sous-bois, en utilisant des papiers de sensibilité différente
(le " Rodamin B Papier " sensible plutôt au jaune-rouge,
et le " Normal Papier " réagissant au bleu-violet).
On considère généralement JULIUS WIESNER comme
le père de la photologie forestière. CIESLAR (1904)
est également cité comme un précurseur en ce
domaine. LUNDEGARDH (1930), LÉMÉE (1937) ont également
employé cette méthode, qui, en raison du développement
de procédés plus perfectionnés, est actuellement à peu
près abandonnée. Le procédé photographique
est évidemment limité par la sensibilité, assez étroite,
des émulsions habituelles, et par la difficulté d'apprécier
avec exactitude le degré de noircissement du papier. Il nécessite également
la présence constante et vigilante de l'observateur.
Un procédé photochimique
un peu différent a été étudié et appliqué en
Grande-Bretagne (LEYTON - 1950) : des ampoules de verre, contenant un
mélange de solutions d'oxalate d'uranium et d'acide oxalique sont
placées dans différentes stations. La réaction photochimique
subie par ce liquide entraîne un changement dans sa couleur et
l'appréciation, délicate, de celle-ci, au bout d'une période
de temps déterminée, permet de chiffrer, d'une façon
approximative, la quantité de lumière qu'elles ont reçue.
Parfois employé, quand on n'a pas besoin d'une grande précision,
ce procédé est totalisateur.
À signaler aussi les essais effectués
aux U.S.A. par BRECHTEL (1967) ; le dosage du rayonnement naturel reçu
dans une station est évalué d'après la modification
du pouvoir de polarisation rotatoire d'une solution de sucres divers,
exposée à ce rayonnement. Le dispositif même d'enregistrement
est très peu coûteux (2 flacons, l'un blanc et l'autre noir,
renfermant une solution de sucres) ; mais les résultats sont assez
délicats à interpréter.
Le photomètre à source lumineuse constante - Ce type d'appareil est, probablement, le plus anciennement utilisé en photométrie. Il est basé sur le fait que l'il humain, incapable, on l'a dit, de chiffrer des intensités
lumineuses, peut, par contre, très
bien apprécier l'égalité de 2 plages lumineuses
(dont l'une est obtenue grâce à une lampe étalon).
BOUGUER, dès l'année 1729, avait mis au point un tel
photomètre dont le principe général a été conservé,
et dont un modèle, très moderne, est proposé actuellement
par JOBIN & YVON (le " nitomètre-luxmètre ").
Ce genre d'appareil, à lecture instantanée, doit être
pourvu d'une source d'alimentation spéciale en courant électrique,
qui alimente une lampe de référence. Il est extrêmement
précis.
Il a été très
peu employé en photologie forestière. Cependant, il
convient de souligner l'utilisation très intéressante
qui en a été faite en Suisse, dès l'année
1914, par KNUCHEL. L'appareil, construit par SCHWEITZER, fut utilisé dans
des forêts des environs de Zurich. Il était lourd (30
kg), alimenté par des accumulateurs, et devait être
transporté rapidement, en général par temps
clair ensoleillé, du plein découvert à la station étudiée.
5 longueurs d'ondes étaient retenues : rouge (0,652µ) - jaune
(0,589µ) - vert (0,520µ) - bleu (0,472µ) - indigo (0,440µ). Dans
chaque station, la proportion de chacune de ces couleurs était
déterminée, dans un cône d'observation vertical
de faible ouverture (12°). Son maniement était long et
délicat. Cependant, grâce à cet appareillage
complexe, KNUCHEL a pu établir certaines données, certaines
relations qui n'ont pas été démenties par les
recherches, bien plus perfectionnées, qui ont été effectuées
récemment sur cet aspect du problème photologique.
Les appareils donnant directement
l'image du couvert - Quand l'on se trouve en forêt,
il suffit de lever la tête pour se rendre compte que le
couvert est constitué par une série de plages lumineuses,
alternant avec des plages sombres. Sous les arbres résineux,
en général, la distinction de ces deux sortes de
plages est très nette. Sous les couverts feuillus, par
contre, surtout s'ils sont légers, on peut percevoir d'autres
plages de luminosité intermédiaire. Cependant,
en utilisant des papiers photographiques très contrastés,
on peut obtenir, avec des objectifs normaux, ou mieux hémisphériques,
des images planes assez nettes de ces divers couverts. On détermine
ainsi le degré de transparence, en faisant le rapport
entre la surface des plages lumineuses, et la surface totale
couverte par l'objectif utilisé. Ce procédé est
très rapide (le temps de prendre une photographie) mais, évidemment,
d'une interprétation photologique exacte assez difficile.
Il a été utilisé jusqu'à présent,
par des chercheurs anglais ou américains (EVANS & COOMBE
- 1959, BROWN - 1962, ANDERSON - 1964, MADGWICK & BRUMFIELD
- 1969), dans les forêts tropicales surtout, par exemple,
où l'on n'a guère la possibilité d'installer à demeure
des appareils totalisateurs ou enregistreurs classiques.
Une autre méthode à rapprocher de la précédente est celle utilisée en Pologne, et dans certains pays de l'Est européen, par MATUSZ (1960), grâce
FIG. 6 - Types d'appareils d'un emploi courant en photologie
forestière.
En haut : Mesure de l'ensemble des radiations solaires ;
pyranomètres sphériques,
de BELLANI-DAVOS installés pour l'étalonnage.
En bas : Mesure des seules radiations visibles : luxmètre
L.A.P. à cellule photoélec
-trique L.M.T. (avec filtre réducteur au 1/20).
à un appareil original dénommé " azurometru ".
Une glace, légèrement convexe, portée par
un trépied, est surmontée d'une coupole hémisphérique
perforée de nombreux petits orifices. Placé dans
une station forestière, cet appareil donne à l'observateur
une image du couvert, superposée à celle de la coupole
hémisphérique perforée. En comptant le nombre
total des petites plages lumineuses existant sur l'image, on en
déduit, approximativement, le " degré de transparence
du couvert". En quelques minutes de stationnement, on peut
ainsi déterminer un élément qui donne, incontestablement,
une idée assez approchée du rayonnement, ou de l'éclairement
relatif qui règne dans la station où l'on a opéré.
En conclusion de cette étude,
on peut relever l'extrême diversité des appareils
récemment ou actuellement utilisés en photologie
forestière. Cette discipline étant très nouvelle,
on rencontre une variété considérable d'instruments,
ou de procédés, plus ou moins satisfaisants, alors
qu'en météorologie classique, les types d'appareils
admis sont certainement moins nombreux. Il serait désirable
que l'Union des Stations de Recherches Forestières, par
exemple, préconise un nombre réduit de méthodes,
et l'emploi de certains appareils, reconnus comme les plus pratiques,
afin de permettre une meilleure comparaison des résultats
publiés.
Il semble cependant se dégager
de la littérature forestière mondiale, que l'on emploie
beaucoup actuellement :
1° Dans les stations complètement équipées
et alimentées en courant électrique, les pyranomètres
du type dit à thermocouple (comme le " Sternpyranometer" de
LINKE, par exemple) (Fig. 4).
2° Dans les stations isolées,
mais d'accès périodique facile, les pyranomètres à distillation,
du type Bellani, sous réserve que l'appareil de référence,
placé en plein découvert, soit situé à proximité d'un
lieu habité (Fig. 6).
3° Dans les stations d'accès difficiles, ou bien dans celles où l'on n'a pas l'occasion de se rendre fréquemment, les luxmètres à photopile, qui ne fournissent que des indications instantanées, et dont l'emploi nécessite certaines précautions (Fig. 6).
On trouvera à la fin de cet ouvrage, un schéma simple de montage d'un totalisateur électronique autonome de lumière, d'une réalisation peu coûteuse.